Interview de Victorien Duval, responsable de publication aux éditions de la Matière noire par Damien Magne sur le site ActuaLitté
La Matière noire contre-attaque : déploiement de matière grise
Le mardi 21 janvier 2014 à 17:43:44
Editeur 100 % numérique, les éditions La Matière noire ont débuté leur carrière l’année passée avec plusieurs règles et consignes de vie appréciables. Tant que des œuvres se dégage une certaine poésie, la maison est prête à lire, étudier, et travailler les textes. Pour ActuaLitté, Damien Magne a réalisé un entretien avec Victorien Duval, responsable de la publication. L’éditeur examine tout type d’ouvrage de fiction à caractère littéraire: roman, nouvelle, conte, poésie. un seul mot d’ordre, on le répète : « Qu’il s’en dégage une certaine poésie. » À découvrir.
Damien Magne : Pouvez-vous, pour commencer, expliquer les raisons pour lesquelles vous avez fait le choix d’une maison d’édition 100 % numérique ?
Victorien Duval : L’avenir de la lecture passe, à mon sens, par le numérique. Nous sommes toutes et tous de plus en plus connectés et passons de nombreuses heures derrière nos écrans. Nous lisons d’ores et déjà énormément en numérique, la littérature va petit à petit y trouver toute sa place. Il n’est pas question de remplacer le livre traditionnel, il est question de choix, d’offre et de diversité. Au contraire de ce que peuvent dire les maisons d’édition traditionnelles, les coûts engagés dans la fabrication du livre numérique sont bien moindres que dans l’édition papier. J’y vois la possibilité de proposer des ouvrages différents qui ne trouveraient pas preneur dans l’édition traditionnelle pour des raisons purement économiques. Pourtant, ces œuvres méritent qu’on s’y arrête. Le choix d’éditer en numérique s’est donc imposé à moi : des coûts de production raisonnables, la possibilité d’être très largement distribué dans un grand nombre de librairies en ligne, cela permet d’être moins préoccupé par les intérêts commerciaux et de se consacrer en priorité à ce qui est le cœur de la littérature : l’œuvre.
D.M. : Nous y sommes. Les détracteurs du numérique n’ont de cesse de parler du plaisir du papier alors que pour l’essentiel, la plupart de leurs lectures (hors littérature) est sur écran : info, recherche d’une définition, d’une recette de cuisine, etc. Aucun de ces détracteurs ne tient ce discours pour 99 % de la presse écrite passés au numérique et particulièrement pour un journal comme Médiapart qui n’est jamais passé par la case « papier ». Cette posture relève de la mauvaise foi voire même du conditionnement pavlovien. Nous retrouvions le même discours lorsque le CD remplaça le vinyle et lorsque le CD fut détrôné par le téléchargement. Sur ce point, ne pensez-vous pas que les « gros » éditeurs et des cohortes de lecteurs « traditionalistes » usent d’une communication — actuellement — à dire que les auteurs publiés par le 100 % numérique ne sont en fait que des écrivains de seconde zone, des médiocres qui ont été rejetés par les « écuries » de prestige que sont les éditeurs historiques, se rabattant sur des « petits » haras pour canassons boiteux ?
V.D. : Les grosses maisons sont des lobbys puissants. Elles protègent leurs petits et avancent leurs arguments en ce sens. Ils jouent de leur influence et on peut difficilement les blâmer. Simplement ils prennent le problème à l’envers et on pourrait effectivement penser que les précédents dans d’autres domaines, comme la musique, devraient être de meilleur conseil. La question n’est pas de savoir si le numérique prendra son essor, la question est de savoir à quel rythme. Ils ont tous les atouts pour être les meilleurs dans le numérique comme ils le sont dans l’édition traditionnelle et n’en font rien. Je crois que l’avenir leur donnera tort et il ne sera peut-être pas si simple de faire machine arrière. Pendant qu’ils perdent leur temps à raconter des bêtises, le monde avance sans eux. Pour notre part, nous n’avons pas à rougir des auteurs présents à notre catalogue, ils sont tous admirables, il suffit de les lire pour s’en convaincre.
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